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Éthique & Liberté - Le journal des Droits de l'Homme de l'Église de Scientologie
Le droit de persécuter  

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Les spécialistes en religion du monde entier condamnent l'action du parlement (1/3)

     «  Le rapport de la commission parlementaire sur les sectes, publié en France le 10 janvier 1996, présente de façon incorrecte et simpliste un phénomène complexe... La commission française a de toute évidence travaillé à partir d’informations défectueuses... Fondé sur les accusations de “témoins” anonymes, ce rapport constitue un appel à la chasse aux sorcières. Un comble si l’on se souvient que la devise par laquelle la France aime a être représentée dans le monde entier est : “Liberté, Egalité, Fraternité.” »
     (Professeur Massimo Introvigne Directeur du Centre d’études sur les nouvelles religions, Turin, Italie.)


[Image] L
e 10 janvier 1996, la commission spéciale d’enquête sur les sectes publia son rapport, un exposé indéniablement accusateur sur le “problème des sectes” en France.

     Le rapport condamne un nombre étonnant de groupes divers, religieux ou non, les cataloguant comme “sectes dangereuses”, tout en admettant que le classement n’était fondé que sur des opinions. Cela n’empêcha pas la commission de recommander sans le moindre scrupule que le gouvernement adopte des mesures dictatoriales : si les “sectes” ne violent aucune loi, il faut tout de même trouver comment contourner la loi pour les persécuter.

     Provenant d’un groupe censé être objectif, il n’est pas surprenant que le grand public, qui n’est pas adéquatement informé, soit alarmé par le rapport et pense que la “question des sectes” est un problème grave.

     On peut aussi comprendre que le rapport ait fait l’objet de protestations de la part de ceux qui se sentent injustement persécutés et classés à tort dans la catégorie des “sectes”.

     Mais comment explique-t-on la réaction indignée, instantanée et spontanée, des spécialistes en religion les plus respectés et renommés en France et même dans d’autres pays ? Car c’est en effet ce qui s’est produit.

Erreurs évidentes
     Des experts du monde entier ont exprimé leur inquiétude devant des vices et des erreurs de faits si fondamentaux et graves qu’essayer de les expliquer en disant que ce sont des erreurs involontaires démontrerait un niveau d’ignorance et d’incompétence inconcevable chez un homme politique, même le plus inepte.

     Quelle serait alors la seule explication possible de ce rapport ? Sans doute le rôle le plus honteux du gouvernement, qui hélas s’est souvent répété dans l’histoire, et qui est celui de servir les intérêts des pouvoirs en place et d’opprimer les opinions et les croyances des minorités. [Image]

     Et là on peut dire que la question est grave, et devrait concerner tous les citoyens. Car lorsqu’un gouvernement s’estime autorisé à poursuivre en secret ses propres intérêts en manipulant l’opinion publique, qui est réellement en sécurité ?

     La commission a commencé son travail en juillet 1995 après que le parlementaire Jacques Guyard, qui a admis depuis longtemps être un porte-parole des groupes comme l’ADFI, eût tiré parti du drame récent du “temple solaire”, un groupe réellement suspect apparemment poussé par sa propre interprétation d’un christianisme apocalyptique.

     Aucune personne sensée ne s’opposerait à une enquête concernant les événements entourant le drame du “temple solaire”. Mais il est absurde, voire injuste, de placer systématiquement d’autres groupes dans la même catégorie  n’importe qui peut voir cela, même avec une connaissance des religions du niveau de l’école primaire. Dans la liste des “sectes” de la commission figure par exemple l’Église baptiste, la religion du président des États-Unis !

     Un autre exemple est l’inclusion d’une association catholique, l’Office culturel de Cluny, vivement critiqué par plusieurs évêques.

     L’évêché de Troyes a envoyé au président de l’Assemblée Nationale la lettre suivante : “Je ne peux admettre que la communauté de l’office culturel de Cluny qui est dans le diocèse de Troyes soit qualifié de secte. J’estime que le tort qui lui est ainsi causé l’atteint non seulement elle même et l’Église catholique dans le département de l’Aube, mais aussi l’Etat, qui est mis en situation de juge et partie sur le terrain des libertés fondamentales qu’il doit garantir.”

     Le journal La Croix du 10 février 1996 publia un communiqué du Secrétariat Général de la “Conférence épiscopale française” qui dit ceci : “Certains s’inquiètent de voir circuler dans les médias, se réclamant du rapport, des listes de groupes qualifiés de “sectes” dont on se demande qui les a inspirées  se substituant à l’autorité judiciaire par une condamnation où l’accusé n’a pas été entendu suivant les règles du droit dans un procès contradictoire et légal”.

     Les évêques italiens ont eux aussi exprimé leur inquiétude lorsque l’Opus Dei, ordre catholique traditionnel, fut attaqué. L’Opus Dei est cautionné par le Pape Jean-Paul II, qui en 1992 a béatifié son fondateur Josemaria Escriva de Balaquer, étape préliminaire à sa déclaration de sainteté. En mars 1996, deux mois après la publication du rapport de la commission, le Pape donna à une église du sud de Rome le nom de Escriva de Balaquer.

Les dessous de l’histoire
     Les diverses autorités furent si nombreuses à exprimer leur inquiétude à propos des dangers que représente le rapport de cette commission que certains d’entre eux entreprirent de compiler un sommaire de leurs opinions. Le Centre d’études sur les nouvelles religions (CESNUR) est une organisation internationale fondée en 1988 et dont le quartier général se trouve à Turin en Italie. Le CESNUR possède l’une des plus grandes bibliothèques d’Europe sur le sujet des nouvelles religions et religions minoritaires. En outre les spécialistes indépendants du CESNUR assistent les autorités recherchant des renseignements dans ce domaine. Reconnu dans le monde entier comme l’une des sources les plus respectées qui soient si l’on désire obtenir des renseignements exacts et à jour. Ni le CESNUR ni ses spécialistes ne sont membres de l’une de ces religions minoritaires.

     Selon une lettre du directeur du CESNUR, le Professeur Massimo Introvigne : “Le rapport présente de façon incorrecte et simplifiée un phénomène complexe et pourrait facilement instaurer un droit de persécution, non seulement en France, mais aussi dans d’autres pays, à cause du rôle leader de la France au plan culturel en Europe et dans le reste du monde.”

     Le Professeur Introvigne fit remarquer que “Tout en ignorant les deux dernières décades de recherche sur les nouveaux mouvements religieux menées par une cohorte de spécialistes à travers l’Europe et l’Amérique du Nord, la commission a apparemment pris la plupart de ses informations auprès de diverses organisations anti-secte telles que ADFI/UNADFI et CCMM, appartenant toutes à un réseau international anti-secte bien connu (voir “Un groupe antireligieux américain se désagrège”). Ces groupes ont multiplié les publications de travaux non scientifiques basés sur les préjugés, et dans les dix dernières années leurs observations ont systématiquement été jugées sans valeur par les tribunaux d’Amérique du Nord et du Royaume Uni.”

     On ne saurait trop souligner le fait que la commission s’est appuyée en grande partie sur des renseignements non vérifiés provenant de l’ADFI. Le rapport de la commission déclare que sur une période de six mois, elle n’a interrogé que vingt personnes, pendant vingt et une heures au total, et que ceci lui aurait permis de “prendre connaissance des informations, de l’expérience et des analyses de personnes ayant à des titres divers, une connaissance approfondie du phénomène sectaire.”

     Qui étaient ces vingt personnes ? Presque exclusivement des représentants de l’ADFI ou de groupes liés à l’ADFI, ou encore d’individus dont la seule source d’information était l’ADFI. Leurs “témoignages” étaient aussi prévisibles et contrôlés que l’étaient les “conclusions” de la commission. Celle-ci refusa catégoriquement d’entendre des témoignages de spécialistes en religion reconnus dans ce domaine.

     Jean Bauberot, directeur du groupe de sociologie des religions et de la laïcité au CNRS (Centre National de Recherches Scientifiques), une autorité incontestée qui n’a pas été entendue, fit remarquer à propos de la commission que de ne sélectionner que vingt personnes et de les entendre sous le couvert de l’anonymat et à huis clos est une étrange façon de faire pour des gens qui accusent les autres de pratiques occultes. “Je suis choqué par le fonctionnement de cette commission” a-t-il dit.

     Selon lui, la commission n’a pas su totalement garder ses distances avec une “conception militante anti-secte” et des “jugements de valeur” quand aux croyances de ces groupes. Jean Baubérot relève que si l’on retient les critères retenus par les députés pour définir les sectes, “des syndicats, des partis, des associations caritatives etc., devraient logiquement être incluses dans la liste...”

     La “lettre du CESNUR”, en réponse au rapport de la commission cite et résume les opinions de nombreuses autres autorités.

Les spécialistes en religion du monde entier condamnent l'action du parlement (3/3)

Des méthodes hautement suspectes
     “Visiblement les travaux de la Commission ont été très sommaires” dit François Chevallier, professeur agrégé de droit public. “Pour l’essentiel, le rapport reprend et décalque les analyses effectuées par les R.G. c’est donc un travail de deuxième main...
Elle reconnaît elle-même n’avoir qu’une très faible connaissance du phénomène qu’elle analyse...
Peut-on sérieusement soutenir en même temps qu’il faut combattre le phénomène et qu’on ne le connaît pas réellement ? ... la commission exclut de son champ d’étude les “religions traditionnelles”...
Est-ce par simple lapsus que ne figure pas dans les “religions traditionnelles” la religion israélite ?”

Une

dangereuse ignorance
     Plusieurs spécialistes ont fait remarquer que le problème que présente l’analyse de la commission sur les “sectes” est qu’elle dénote une profonde ignorance des religions.

Une violation des valeurs fondamentales
     Maître Olivier-Louis Seguy chargé des cours au conservatoire national des Arts et métiers et avocat à la Cour d’Appel de Paris a déclaré dans un article des Petites Affiches du 5 février 1996 : “Toute tentative de légiférer sur le contenu des enseignements d’un nouveau mouvement religieux, d’un nouveau mouvement de pensée, qu’il soit qualifié ou non de secte par ses détracteurs, se heurterait aux valeurs fondatrices que notre république a adoptées au cours des deux derniers siècles...”

     Philippe Gast, docteur en Droit et Maître de conférence à l’Université du Havre a souligné dans les Petites Affiches du 7 février 1996 : “La commission aurait dû consulter des spécialistes de ces questions” a-t-il dit “et que ce ne soit pas des personnes souvent de bonne volonté, certes, mais incompétentes et qui se donnent l’expression d’exister en menant une croisade médiatique contre leurs fantasmes diabolisés.”

Une démonstration de stupidité
     Enfin, le docteur Introvigne révèle un fait qui illustre les méthodes de travail inacceptables de la commission. En effet, le rapport glorifie le fait qu’en Italie, on reconnaît le crime de “piaggio” et la commission suggère qu’on utilise cela comme modèle pour une loi française destinée à contrôler les minorités.

     Cependant, comme le fait remarquer le docteur Introvigne, il n’existe pas de loi de piaggio, ni en Italie, ni nulle part d’ailleurs. “Piaggio” est le nom d’une marque bien connue de motocyclettes italiennes.

     “Mais, dit le docteur Introvigne, même si la commission avait été capable d’utiliser le terme correct Plagio le délit de plagio a été éliminé du code pénal italien en 1981 par la cour constitutionnelle, justement à cause de son caractère vague et de son lien avec des théories sur la manipulation mentale déjà extrêmement incertaines dans la psychiatrie.”

     Pour quiconque croit à la sauvegarde de la liberté d’opinion et d’expression, il est intolérable qu’une commission parlementaire puisse se conduire de la sorte et user de procédés aussi iniques, fondant ses conclusions sur des preuves aussi évidemment discréditées. Et la moindre des choses est de transmettre la vérité.

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