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IL EST une constante de lHistoire de France de ces mille dernières années qui devrait faire un peu plus réfléchir nos élus cest bien la persécution officielle de mouvements religieux jugés gênants par les tenants du statu quo, cramponnés à leurs privilèges. « Cette persécution se fait toujours au nom des mêmes principes : protection du citoyen et protection de lordre public. Le mouvement persécuté nest dailleurs jamais présenté comme une vraie religion par ceux qui le persécutent. Cest une hérésie, une fausse religion, ou une secte », commente un spécialiste.
Par exemple, la religion protestante est dénigrée sous lappellation de religion prétendue réformée (R.P.R) par les catholiques. La persécution apparaît toujours sordide après coup. Mais lorsquelle bat son plein, elle a été précédée par de telles campagnes de désinformation quelle apparaît pleinement justifiée à la majorité des citoyens. Comme lécrit lhistorien Pierre Barrucand : « La virulence des attaques contre une minorité paraît toujours abusive et inacceptable... après coup. Sur le moment très peu de gens échappent à lintoxication de la peur engendrée par la propagande de quelques individus habités par une haine quasi pathologique et qui se nourissent les uns les autres dune idéologie de lexclusion ».
Voici une liste non exhaustive de persécutions diverses que les citoyens daujourdhui réprouvent avec une belle unanimité, mais contre lesquelles très peu de personnes se sont élevées à lépoque des faits :
- En 1215, le concile de Latran décrète que tous les juifs doivent porter sur leurs vêtements un signe distinctif : la rouelle. Tout au long du Moyen-Age de nombreux juifs, accusés de se livrer à des sacrifices denfants, périront en France sur le bûcher. Cette rumeur persistera jusquau dix-septième siècle. En fait, les actes antisémites officiels ne cesseront en France quà la Libération.
- Le 16 mars 1244, environ deux cents cathares, hommes, vieillards, femmes, enfants sont brûlés vifs sur le bûcher de Montségur. Cest le tragique dénouement dune longue suite de massacres, la croisade contre les Albigeois (cathares de la région dAlbi), commencée en 1208. Les cathares prônaient une vie austère, détachée des biens matériels, ce qui, au XIIIe siècle, tranchait avec lopulence du clergé catholique. LÉglise voua une haine implacable non seulement envers les cathares mais encore envers tous ceux qui les protégeaient.
- Le 13 octobre 1307, dans tout le royaume, les Templiers sont arrêtés sur ordre du roi et leurs biens sont confisqués. Cétait un ordre militaire de moines soldats, fondé lors de la première croisade, deux siècles plus tôt. Les Templiers étaient devenus extrêmement populaires et il faudra au roi qui convoitait leurs richesses une très longue campagne de désinformation, de propagation des rumeurs les plus scabreuses sur leur compte pour faire accepter par le peuple larrestation brutale des Templiers. Les chevaliers comparaissent devant le tribunal de lInquisition en novembre 1307. Des aveux leur sont extorqués sous la torture. LOrdre est dissous par bulle pontificale en 1312. Le grand maître de lOrdre, Jacques de Molay, est brûlé vif le 19 mars 1314.
- Le 24 août 1572, sur ordre du jeune roi Charles IX, conseillé par sa mère Catherine de Médicis, plusieurs milliers de protestants sont massacrés dans les rues de Paris. Un bourgeois de passage à Paris note : « le sang coulait dans les rues comme sil en pleuvait ». Dans les jours qui suivront, plus de dix mille protestants seront massacrés en province. Michel de lHopital, ministre du roi Henri IV, dira plus tard : « Périsse à jamais ce jour néfaste pour lHistoire ».
- Le 16 octobre 1685, Louis XIV révoque lÉdit de Nantes. Larticle 2 dispose : « Défendons à nos dits sujets de la religion prétendue réformée de plus sassembler pour faire lexercice de la dite religion, en aucun lieu et maison particulière (...) ». Larticle 8 dispose : «A légard des enfants qui naîtront de ceux de la dite religion prétendue réformée, nous voulons quils soient baptisés par les cures des paroisses. Enjoignons aux pères et mères de les envoyer aux églises à cet effet là, à peine de cinq cents livres damende (...) ». Environ 300 000 protestants senfuient et émigrent vers les pays voisins. Les protestants restés en France seront persécutés jusquà la révolution française.
- Le 7 juillet 1904, une loi interdit à toutes les congrégations religieuses de dispenser un enseignement. Cette loi entraînera la fermeture de 2 400 écoles et lexil hors de France de plusieurs dizaines de milliers de congréganistes.
- Les 16 et 17 juillet 1942, la police française (Gendarmerie, Garde Mobile, Police Judiciaire, Renseignements Généraux) arrête 12 884 Juifs, dont 4 051 enfants. Les familles avec enfants sont parquées au vélodrome dhiver durant plus dune semaine avant dêtre livrées aux allemands. A la fin du mois daoût 11 000 juifs sont arrêtés au cours dune deuxième vague darrestations. Dans dautres pays, les autorités refusent de collaborer avec loccupant. Les finlandais nacceptent pas de livrer leurs juifs. Le roi du Danemark refuse en 1942 dimposer aux juifs le port de létoile jaune et la police danoise organisera par la suite en secret la fuite de la population juive. Très peu de juifs seront arrêtés par les allemands au Danemark.
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