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Il faut donner lalerte face aux menaces qui pèsent sur la liberté de religion.
OTRE SOCIÉTÉ est marquée par un pluralisme de plus en plus affirmé. Au fur et à mesure des changements, les religions établies se sont faites plus nombreuses et de nouvelles religions se sont transformées à leur tour en religions établies, et il est devenu de plus en plus difficile de définir ce qui constitue une religion. Quels critères les universitaires et autres spécialistes devraientils retenir ? Les traditions chrétiennes ? Les principes des croyance orientales ? Les croyances et les pratiques communes aux nouveaux mouvements religieux ? Depuis quelques années, les universitaires ont abandonné lapproche doctrinale des religions au profit dune étude plus globale des caractéristiques essentielles communes à toutes les religions : une croyance en un Être Suprême ou Réalité ultime, des pratiques religieuses qui permettent à lHomme de sunir ou de communier avec cette réalité ultime, et lexistence dune communauté qui se réunit dans ce but.
« La tolérance religieuse ne remplace pas la liberté religieuse. Celle-ci suppose une reconnaissance et une juridiction contre les discriminations religieuses de la même façon quil existe une législation contre les racismes. »
Régis Dericquebourg
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Non seulement cette démarche permet de mieux comprendre toutes les croyances, mais elle a mis en évidence la nécessité de protéger la liberté de religion.
Au cours de lHistoire, de grands intellectuels ont prôné et défendu cette liberté face à lobscurantisme et à lintolérance.
Dans le climat dextrémisme anti-religieux qui se développe en France depuis 1985, la liberté de religion a subi de multiples assauts. Le danger na jamais été aussi grand que cette liberté soit vidée de tout contenu, danger dénoncé par de nombreuses personnalités :
- Le pasteur Jacques Maury, alors président de la Fédération Protestante de France, dans un discours de commémoration de la Révocation de lÉdit de Nantes, le 11 octobre 1985 : « Dailleurs où passe la limite entre secte et église ? La commémoration daujourdhui nous rappelle assez que nos Églises protestantes aussi ont été pendant des siècles traitées, et de quelle manière, comme des sectes. Voilà pourquoi dans ce récent débat nous avons rappelé à deux reprises que « la liberté religieuse est indivisible ».
- Léditorialiste Louis Pauwels (Le Figaro Magazine, 30 avril 1985) : « Le soulèvement de lopinion contre les sectes a pour conséquence désirée de disqualifier toute attitude religieuse. Cela est évident et dailleurs avoué. [...] Il se peut que certaines sectes transgressent la loi : cest laffaire des tribunaux. Je ne crois pas que les miroirs fêlés portent malheur, mais les cerveaux fêlés, si. Pourtant, je me méfie moins des associations de cerveaux fêlés que dun État socialiste qui prétend les réparer et envisage des organismes administratifs pour décider de lintégrité mentale des citoyens. [...] Vous verrez que lon tentera de nous en convaincre. Un scandale de secte viendra à point. Il vient, je le sens. Ceux qui craignent, avec tant de bonté, quon lave le cerveau dun quidam savent laver le cerveau dune nation ».
- Le sociologue des religions Émile Poulat : « Secte est un mot piège, un mot socialement piégé. Tout groupe, un jour ou lautre est susceptible dy être pris. Au regard dintraitables adversaires laïcistes, anticléricaux, athées militants lÉglise (catholique) reste une secte qui a su réussir ».
- Le professeur de droit Jacques Robert, membre du Conseil Constitutionnel (Le Monde, 15 mai 1992) : « Pour prendre un exemple, le protestantisme fut, à ses origines, une secte oh combien persécutée ! Lui dénie-t-on pour autant aujourdhui le statut de religion ? Finalement, la religion ne serait-elle pas seulement comme on la naguère avancé, une secte qui a réussi ? »
- Le pasteur Louis Schweitzer, alors secrétaire général de la Fédération Protestante de France (Le Progrès de Lyon, 12 janvier 1995) : « Certains mots ne sont plus guère porteurs de sens, mais sont simplement devenus des injures, des armes utilisées pour éliminer lennemi ou le concurrent. Le mot secte est de ceux-là. Traiter aujourdhui un groupe de secte, cest avant tout le disqualifier, quelles que soient les hypocrites précautions de langage dont on entoure lexpression ».
- Le sociologue des religions Régis Dericquebourg (Pour en finir avec les sectes, juin 1996 : « La diversité religieuse exige que lon sorte de nos cadres de pensée habituels. Il ne sagit pas de demander une tolérance condescendante qui consiste à saccommoder socialement de quelques bizarreries en se disant que des gens se trouvent dans lerreur mais quil faut bien les accepter. La tolérance religieuse ne remplace pas la liberté religieuse. Celle-ci suppose une reconnaissance et une juridiction contre les discriminations religieuses de la même façon quil existe une législation contre les racismes. »
- Le professeur de sciences religieuses Antoine Faivre (Impact Quotidien, 3 avril 1997) : « [...] Le débat est trop facilement orienté dans le sens dune chasse aux sorcières dont les positions extrémistes satisfont les médias par leur simplicité. [...] Toute tendance qui consisterait à favoriser linstauration dun droit de persécution doit être accueillie avec méfiance. »
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