Les associations internationales de défense des droits de lhomme sinquiètent : Alain Vivien met la France dans une position très controversée sur la scène internationale
out au long de ces dernières semaines, lattention des associations de défense des droits de lhomme du monde entier sest focalisée sur la France. Le 26 juin, les représentants dune quarantaine dorganisations gouvernementales et des droits de lhomme se sont réunis à La Haye dans le cadre dune conférence parrainée conjointement par le Ministère néerlandais des Affaires Étrangères et lOrganisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE), qui fait partie des plus importantes organisations internationales chargées de préserver la stabilité et les droits de lhomme. La conférence, qui avait pour titre : « La liberté de religion ou de croyance sur le territoire de lOSCE : Défis au droit et à la pratique », avait pour but didentifier les situations contraires aux droits de lhomme en matière de liberté religieuse et de suggérer des solutions.
Exception remarquable au protocole de la conférence, selon lequel aucun pays ne devait être spécifiquement cité pour violation de ces droits, le nom de la France était sur toutes les lèvres.
Notre pays se trouvait à nouveau au premier rang des préoccupations de nombreux délégués lors dune autre conférence de lOSCE qui se tenait à Paris le 10 juillet.
En fait, depuis ladoption de la loi About-Picard(1) qui permet de détruire tout groupe spirituel, ethnologique ou philosophique qui déplaît aux autorités en facilitant sa dissolution, les institutions des droits de lhomme du monde démocratique ont mis la France à leur ordre du jour.
Donner le mauvais exemple
Il est extrêmement préoccupant que la France montre le mauvais exemple à des pays qui ont une tradition de traitements abusifs des minorités religieuses, et quelle effectue une promotion active de sa loi auprès de ces nations.
Pour Aaron Rhodes, président de la Fédération Internationale dHelsinki : « La loi est une menace à la tolérance religieuse et aux libertés fondamentales qui sont au cur des valeurs politiques françaises. Le gouvernement de Hong Kong est apparemment disposé à utiliser ce nouveau modèle pour réprimer le Falun Gong. Est-ce cela, le rôle international que les Français veulent jouer ? »
Un participant à la conférence de La Haye a estimé la loi About-Picard « si pernicieuse quelle est devenue un modèle pour le gouvernement chinois. »
Jean-Arnold de Clermont, président de la Fédération protestante de France, sinquiète lui aussi que la France devienne « une source dinspiration pour des pays (Chine, pays dEurope de lEst) où les libertés religieuses ne sont pas toujours respectées. » Le Figaro, 1er juin 2001.
Ces commentaires font allusion au fait que le gouvernement chinois, engagé dans une persécution frénétique du mouvement bouddhiste Falun Gong et des églises chrétiennes, sest ouvertement référé à lexemple français.
De récentes études estiment entre 100 et 200 le nombre de décès de membres du Falun Gong, lors de leur détention par la police ou dans des camps. Les appels lancés suite à cette répression par des associations des droits de lhomme comme Amnesty International devraient faire réfléchir à la gravité de lalliance franco-chinoise et aux implications de la loi About-Picard.
Le « modèle » français
Laxe Paris-Pékin est loin dêtre une simple coïncidence embarrassante. Sa mise en place a été activement encouragée par Alain Vivien, chef de la Mission Interministérielle de Lutte contre les Sectes (MILS), qui a apporté la caution du gouvernement à la loi About-Picard et à ses farouches partisans.
La présence officielle dAlain Vivien lors dun symposium organisé par les autorités chinoises sur le thème des sectes en novembre 2000 a fait lobjet dune vive controverse et de nombreuses spéculations. Peu après le symposium, le gouvernement chinois a lancé un assaut sans précédent contre les églises chrétiennes, détruisant environ 1 500 lieux de culte.
Selon les sources dÉthique et Liberté, A. Vivien aurait également participé en avril 2001 à une conférence en Russie, à Nijni-Novgorod, où il aurait co-signé avec des participants chinois et russes et des membres dorganisations antireligieuses de cinq autres pays, un document demandant ladoption dune législation type loi About-Picard contre les groupes religieux étiquetés sectes. A. Vivien était le seul représentant officiel dun gouvernement à participer à cette conférence, à la possible exception des Chinois.
La presse de Hong Kong a fait état dun projet gouvernemental qui vise à rendre illégal le mouvement Falun Gong, tout comme en Chine continentale, en faisant voter une loi dont « la France est sur le point dadopter la principale disposition ». Cette disposition permettrait au gouvernement de mettre hors-la-loi une organisation dès lors quune association sur a été étiquetée comme secte nuisible par un pays étranger. Lallusion est claire : un groupe mis hors-la-loi en France sera considéré comme tel en Chine.
Lisolement dAlain Vivien
Jusquà présent, toutefois, Hong Kong na pas suivi le modèle français. Le 21 juin dernier, le Secrétaire de lAdministration, Donald Tsang Yam-Kuen, déclarait dailleurs : « Nous ne sommes pas en train de légiférer. Dans une société libre comme Hong Kong », a-t-il expliqué dans un rapport destiné à la presse « chacun a sa propre définition. M. Tung (Tung Chee-hwa, chef de lexécutif) a sa propre définition, les Bouddhistes ont la leur, les Catholiques en ont une autre. Mais cest ce qui est magnifique à Hong Kong », a-t-il ajouté. « Il est naturel que les gens aient des points de vue différents sur ce quest une secte. »
Les dernières prises de position des autorités de Hong Kong ont encore renforcé lisolement de la France dAlain Vivien à lintérieur de lOSCE sur les questions de libertés religieuses.
Apparemment, cet isolement ne se limite dailleurs pas à lOSCE. La coopération manifeste dAlain Vivien avec les Chinois était en contradiction avec la position française lors de la compétition entre les deux pays pour les Jeux Olympiques de 2008.
En mai 2001, le Comité International Olympique (CIO) avait publié son rapport détaillé sur les avantages des villes candidates à lorganisation des Jeux Olympiques, évaluant favorablement les offres de Pékin, Paris et Toronto et écartant Istanbul, en Turquie, et Osaka au Japon. Lévaluation était centrée sur les mérites techniques des villes et ne se prononçait pas sur les aspects politiques, comme les droits de lhomme. Le rapport confirmait ainsi Pékin comme ville favorite.
Le Comité International Olympique avait souligné quil ne prenait pas en considération les aspects politiques, mais le représentant français, Claude Bebear, a abordé le sujet, demandant comment la Chine pouvait être un candidat sérieux eu égard à son traitement des droits de lhomme.
Alors que de nombreuses personnalités dans le monde font écho à cette question, des politiciens aux positions extrémistes continuent, en France, ces actions mêmes qui font de notre pays un modèle pour la Chinela loi About-Picard en étant la parfaite illustration.
Les délégués à la conférence de lOSCE de La Haye ont décidé à une écrasante majorité de sopposer à toutes les tentatives dimitation de la loi française.
Un des premiers effets de la loi serait donc davoir renforcé la volonté de dialogue et de protection de la liberté religieuse dans les autres pays européens.
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De lavis général, louverture du dialogue est une caractéristique significative des pays respectueux des idéaux démocratiques. Lattitude de la France à cet égard paraît anormale.
Conférence de La Haye, 26 juin 2001
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De nombreux participants ont salué une amélioration de la prise de conscience et louverture dun véritable débat à propos du droit à la religion de son choix dans les territoires de lOSCE. De lavis général, louverture du dialogue est une caractéristique significative des pays respectueux des idéaux démocratiques. Lattitude de la France à cet égard paraît anormale.
Au contraire, le refus obstiné dengager le dialogue est caractéristique des régimes totalitaires, qui imposent une approche rigide, de façon à nadmettre aucune faille dans la pensée unique officielle.
La France a été critiquée à plusieurs reprises pour son approche, en particulier depuis que les questions concernant les religions minoritaires ont été placées sous lautorité dAlain Vivien.
Lagressivité (et le refus du dialogue) envers les groupes minoritaires et les associations de Droits de lhomme indépendantes ont caractérisé A. Vivien et sa MILS tout au long de ses deux années dexistence. La MILS a été créée sur les recommandations dune commission parlementaire de 1995 sur les sectes, qui a établi une liste noire de 172 groupes sans avoir rencontré les représentants de ces mouvements
Le mandat officieux de la MILS est-il de vider la liberté religieuse de tout contenu et de débarrasser le pays des groupes spirituels, philosophiques ou ethniques qui lui déplairaient ? La loi About-Picard est-elle le premier pas sur cette voie ?
(1) Loi About-Picard pour la dissolution des groupes spirituels, ethnologiques et philosophiques en France, qui porte le nom de ses principaux rapporteurs, le sénateur Nicolas About et la députée Catherine Picard. (Voir également larticle le Spectre du Totalitarisme, page 3).
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