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Éthique & Liberté - Le journal des Droits de l'Homme de l'Église de Scientologie
L'exception Française  

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SÉPARATION DE L’ÉGLISE ET DE L’ÉTAT

Analyse de M. R. Renard, Avocat à la Cour


A
UCUNE loi ne prévoit qu’il appartiendrait au Premier Ministre de reconnaître à une association quelconque le titre de religion.

En France, le statut des cultes est actuellement régi par la loi du 9 décembre 1905, dite « Loi de séparation de l’Église et de l’État ». Son article 2 dispose expressément : « La République ne reconnaît, ne salarie, ne subventionne aucun culte ». Ce texte exprime la conception française de la laïcité, plus ou moins synonyme de neutralité, ce qui signifie que les pouvoirs publics s’interdisent toute intervention, positive ou négative, dans les questions religieuses.

Il convient de préciser ce que veut dire le terme ne reconnaît. Le système instauré par la loi de 1905 s’oppose en effet au régime dit concordataire mis en place en 1802 et qui a perduré jusqu’en 1905. Il était instauré une distinction entre les cultes non reconnus et ceux qui étaient reconnus, à savoir les cultes catholique, protestant et israélite. Ceuxci bénéficiaient de certains avantages matériels, leurs ministres étaient rémunérés par l’État, à l’instar des fonctionnaires.

La liberté de conscience était néanmoins totale : les citoyens pouvaient avoir une autre religion, ou n’en professer aucune. Mais dans le premier cas, les ministres du culte ne pouvaient prétendre à aucun avantage matériel.

La loi du 1er juillet 1901 sur les associations fut le préalable nécessaire à la loi de séparation de l’Église et de l’État. Elle se montra fort prudente en ce qui concerne les droits et libertés accordés aux Églises. C’est ainsi que les cultes devaient avoir pour cadre juridique des associations cultuelles. Celles-ci devaient remplir des conditions extrêmement strictes, notamment ne pouvaient avoir pour objet que l’entretien d’un culte. Toute autre activité leur était interdite, caritative ou d’enseignement.

Les associations cultuelles n’avaient que la petite personnalité morale. Elles n’étaient pas habilitée, par exemple, à acquérir à titre gratuit, c’est-à-dire à recueillir des dons et des legs. Ce n’est qu’une loi du 8 juillet 1941 qui permit aux associations cultuelles de recueillir des dons et legs, moyennant une autorisation administrative. Cette loi n’est qu’une application d’une disposition du Code civil qui a pour but de protéger les familles contre les libéralités excessives.

Tout ceci était parfaitement clair et ne donnait lieu à aucune difficulté jusqu’au début des années 1980. À cette époque, certaines associations à but religieux tentèrent de demander l’autorisation administrative requise en vue de pouvoir recueillir des dons et legs. C’est ainsi que le 1er février 1985, le Conseil d’État fut amené à rendre une décision en cette matière, dans une espèce qui concernait les Témoins de Jéhovah.

La notion d’association cultuelle n’est nullement déterminée par les autorisations administratives permettant de recueillir dons et legs.
Le Conseil d’État, en réalité, refusait à l’association le caractère de cultuel, parce que son but n’était pas exclusivement l’entretien d’un culte : elle se consacrait, par exemple, à l’édition et à la diffusion de brochures à des fins de prosélytisme. Cette jurisprudence, qui était encore conforme tant à la lettre qu’à l’esprit de la loi de 1905, fut le signal de nombreuses dérives.

L’idée s’implanta progressivement que c’était l’autorisation administrative qui consacrait ou non le caractère cultuel d’une association à but religieux.

Cette thèse triompha à l’occasion du rapport Gest, qui préconisait comme mesure destinée à la répression de certains mouvements dits sectes la reconnaissance par le Ministre du caractère cultuel d’une association. Une telle interprétation est à l’évidence contraire tant à la lettre qu’à l’esprit de la loi de 1905, de même qu’à de nombreuses dispositions légales qui assurent la liberté religieuse, tant au plan du droit interne qu’en matière de conventions internationales. Compte tenu du rappel historique qui précède, il est certain que la notion d’association cultuelle n’est nullement déterminée par les autorisations administratives permettant de recueillir dons et legs, puisqu’il a fallu attendre plus de trente ans pour que les associations cultuelles se voient reconnaître la grande personnalité morale. De plus, la loi de 1905 n’établit aucune distinction entre sectes et religions, mais assure seulement la liberté des cultes.

Il s’agit donc de faux problèmes, qui résultent de confusions, peut-être volontairement entretenues, entre les notions de sectes, de religion, d’association cultuelle. Et le propre des faux problèmes est de ne pouvoir trouver de solutions. Reste à savoir si le gouvernement pourrait, comme le suggérait le rapport Gest, dire quelles sont les associations religieuses qui sont des sectes, et quelles sont celles qui sont des religions.

Note de la rédaction :

Les déclarations récentes de J.-P. Chevènement lors de la ratification le 28 janvier dernier par seize représentants de l’Islam des Principes et fondements juridiques régissant les rapports entre les pouvoirs publics et le culte musulman, semblent indiquer que telle n’est pas l’orientation retenue par le gouvernement.

Le Ministre a donné une définition positive de la laïcité, qui est à ses yeux «naturellement protectrice des religions minoritaires» : elle « ne prémunit pas seulement chaque citoyen contre toute discrimination relative à sa religion ; elle fait de la chose publique une chose véritablement commune, où il n’y a de place que pour l’argumentation éclairée par les lumières de la raison ».

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