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A la veille du 50ème anniversaire de la convention européenne des Droits de lHomme : la France isolée.
France Soir,
4 mars 2000
ES ORGANISATIONS de défense des droits de lhomme répètent inlassablement leur message dans les salles de conférence du monde démocratique : les gouvernements doivent entamer un dialogue avec les religions minoritaires pour résoudre les différences apparentes, et non choisir la confrontation.
Alors que plusieurs pays dEurope occidentale sont félicités pour avoir progressé en 1999 sur la voie de la tolérance et du dialogue, la France est aujourdhui sous influence.
La Mission Interministérielle de Lutte contre les Sectes (MILS) et son président Alain Vivien, auquel ses prises de position extrémistes tiennent lieu de programme, mettent la démocratie en danger. Enfourchant à nouveau le cheval de bataille qui lui avait déjà permis en 1985 de sortir de lanonymat politique, celuici a engagé la France dans une politique agressive de confrontation.
Ses méthodes sont de plus en plus contestées au sein même de la MILS.
Lun des membres du conseil dorientation, dans une lettre envoyée à A. Vivien le 14 décembre dernier, dénonçait « le mépris de toutes pratiques démocratiques au sein de la MILS », et considérait que la mission était devenue « le bien exclusif » de son président. (Le Monde, 22 janvier 2000).
Les faits parlent deux-mêmes. Le rapport rendu public le 7 février dernier illustre de façon éclatante lisolement de Vivien et de sa MILS (Voir Dans la ligne de mire, p. 3)
Quant aux propositions de ce rapport, elles ont dans un premier temps été jugées si extrêmes par le Premier Ministre que celui-ci en a différé la présentation officielle et invité à A. Vivien à revoir sa copie. Les passages les plus scandaleux auraient, dit-on, comporté, au mépris de toute diplomatie, des accusations anti-américaines si grossières quelles menaçaient de causer un incident international.
Les modifications apportées ont peut-être permis de sauver les relations diplomatiques entre les deux pays, mais elles ne suffisent ni à restaurer la crédibilité de leur auteur, ni à éviter la vague de critiques provenant de la communauté des droits de lhomme.
La publication du rapport et sa proposition dinstaurer des lois dexception ont déclenché de virulentes protestations (voir article Dans la ligne de mire, p. 3), qui ne sont dailleurs pas sans rappeler les réactions indignées qui avaient accueilli le rapport sur les sectes de Vivien en 1985.
Le Syndicat de la Magistrature (SM) a fait connaître son opposition, tout comme lAssociation professionnelle des magistrats (APM), qui dénonce lhystérie antisectes (Le Monde, 10/2)
Vivien a résumé à sa façon la position de la France. Commentant son refus de dialoguer pour obtenir des informations et connaître le point de vue des groupes religieux quil combat, il déclara à un journaliste : « Nous navons pas à prendre en compte [leur] contenu ». (Libération, 27/09/98)
Selon certains observateurs, le problème commence avec le concept même de la MILS, dont le nom suggère quil y a quelque chose contre quoi lutter, ou des raisons à cette lutte. Mais à y regarder de plus près, la sémantique de la dénomination de ce groupe ne suffit pas à cacher son fanatisme inhérent : la MILS de Vivien nest rien dautre quun forum où des politiciens extrémistes comme lui-même peuvent inciter à la discrimination contre certaines minorités religieuses, et ceci en tant quinstance officielle.
Dans son combat contre les soi-disant «sectes», A. Vivien fait cavalier seul, prenant le contre-pied du système judiciaire et des positions exprimées par les ministres de lIntérieur et de la Justice, qui ont récemment rappelé leur attachement au principe de la liberté de conscience.
Le Ministre de lIntérieur sest publiquement démarqué des positions et des méthodes dA. Vivien et de sa MILS en précisant, dans une circulaire adressée le 20 décembre dernier à tous les préfets :
« La qualification de mouvement sectaire qui est donnée à une association par les différents rapports parlementaires ne saurait révéler à elle seule un quelconque trouble à lordre public. » (Le Monde, 22 janvier 2000)
En effet, les tribunaux nayant pas rendu le verdict quattendaient A. Vivien et ses amis dans un certain nombre daffaires, ceux-ci tentent de faire juger à nouveau ces dossiers sur la place publique, les livrant en pâture aux médias dont on connaît le goût pour le sensationnel.
Continu...
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