Beaucoup de bruit pour rien : cette expression familière décrit parfaitement la controverse politico-médiatique actuelle autour des soi-disant « sectes ».
out lédifice censé légitimer lextrémisme anti-religieux en France repose sur un document officiel, le rapport dune commission parlementaire de 1996, qui comprend une liste de 172 minorités philosophiques et spirituelles.
Présenté comme le résultat du travail du Parlement français, le rapport a en fait été monté par un très petit nombre de députés.
Les spécialistes des religions et les organisations internationales des droits de lHomme ont unanimement condamné le document connu sous le nom de rapport Guyard pour sa non-objectivité. Guyard et ses co-auteurs ont soigneusement ignoré les spécialistes des mouvements religieux, préférant se reposer sur les dossiers fournis par les Renseignements Généraux (RG), et les informations fournies par lAssociation de Défense de la Famille et de lIndividu (ADFI).
LADFI est une organisation qui refuse tout dialogue avec les minorités spirituelles et qui a réussi à influencer la politique du gouvernement français en la matière.
Une demande de subventions soumise par lADFI (les subventions publiques constituent son principal mode de financement) met en avant sa collaboration avec les RG comme un élément-clé de ses actions.
Dans un livre paru après la publication du rapport parlementaire, lancien commissaire des RG, Patrick Rougelet, explique en quoi a consisté « lanalyse » des RG sur laquelle la commission sest appuyée :
« Les RG, sur la question, navaient pas grand chose », écrit Rougelet... « En catastrophe, il a fallu fabriquer un rapport. Un fonctionnaire sest chargé de compiler les travaux faits par dautres, notamment par les gendarmes. Un rapport avait déjà été écrit [...]. Il a en grande partie été recopié. Le rapport des RG sur les sectes a ensuite inondé toutes les rédactions, comme un document de référence. »
À lheure où la montée de lextrême droite constitue un phénomène européen, utiliser les services de renseignement pour enquêter sur des groupes spirituels est un gaspillage de ressources qui pourrait se révéler fort dangereux. On légitime des actions à lencontre de membres de minorités religieuses qui ne peuvent avoir quun caractère antidémocratique.
Les méthodes Guyard dénoncées par le tribunal
Le rapport Guyard a servi de modèle au rapport parlementaire belge publié en avril 1997, qui stigmatisait 189 groupes spirituels et religieux étiquetés sectes. On trouve sur cette liste les Juifs hassidiques, les Témoins de Jéhovah, les Bahais, les Bouddhistes zen, les Scientologues, les Adventistes du 7e jour, les Quakers, cinq groupes catholiques (dont Le Renouveau charismatique) et la plupart des églises pentecôtistes.
La proposition de création de la Commission belge et le rapport qui allait suivre se basaient presque exclusivement sur le modèle français.
Dans sa lettre dinformation de septembre 1988, lorganisation Droits de lHomme sans frontières, basée à Bruxelles, soulignait la partialité des méthodes de la Commission :
« Parmi les représentants dassociations invités [à être entendus], quatre dentre eux faisaient partie des associations anti-sectes belges : lune était le président de lUNADFI (Union Nationale des Associations de Défense de la Famille et de lIndividu), le plus important mouvement anti-sectes en France,
« Les minutes des audiences qui ont été publiées
montrent linconsistance et les préjugés culturels du discours des associations anti-sectes, qui ignorent totalement la littérature scientifique sur les nouveaux mouvements religieux, se fondant exclusivement sur leurs propres documents et sur les coupures de presse. »
Malgré ces constatations, des milliers de personnes, en France comme en Belgique, continuent à être harcelées, ostracisées et persécutées sur la base de rapports composés de rumeurs malveillantes et sans fondement.
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