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« La discorde est lun des grands maux de lhumanité ; et la tolérance en est le seul remède. »
Voltaire
es conséquences de lintolérance religieuse peuvent être terribles. Des enfants sont arrachés aux bras de leurs parents, des innocents sont mis sur listes noires, des carrières sont détruites par lintermédiaire de boycotts organisés.
Telle est la France daujourdhui. En mars 2000, des églises et des organisations de défense des droits de lHomme ont organisé à Paris une réunion publique sur lintolérance. Des membres de minorités spirituelles ont témoigné, devant un panel dexperts internationaux des droits de lHomme et de la liberté religieuse, de la discrimination quils avaient vécue en France. Des officiels et des hommes politiques, par exemple Alain Vivien, chef de la MILS (voir à gauche), étaient cités à comparaître. De cette réunion est née une alliance entre les minorités spirituelles sous le nom de Coordination des associations et particuliers pour la Liberté de conscience, qui a depuis tenu des réunions similaires à Lyon, Marseille, Rennes, Auxerre et Bruxelles.
Les témoignages mettent directement en cause des groupes tels que lADFI et le CCMM, tenus pour responsables du climat hostile qui entoure les minorités religieuses et qui a conduit à la proposition de loi de la députée Catherine Picard (voir page 2). Cette loi, si elle était adoptée, renforcerait sensiblement la capacité de lADFI et du CCMM à dénier aux fidèles dune religion minoritaire leurs droits fondamentaux.
Mais surtout, les récits de ceux qui souffrent en raison de leurs croyances religieuses traduisent leur angoisse et ne peuvent manquer démouvoir.
Nous sommes des citoyens
Une jeune femme, élue en mars 1999 parmi plus de 700 candidates pour représenter la France au prestigieux Concours de lEurovision à Jérusalem, a dit au jury dexperts ce qui sétait passé ensuite :
« Deux jours après lélection, le journal local de Perpignan où je suis née, a écrit que jappartenais à la secte Raël. Plus de 100 media ont rapporté cette information, disant que cétait un scandale pour le Concours de lEurovision et affirmant que je ne méritais pas de représenter la France.
« Jétais constamment suivie par les RG, le service de renseignements français. Des messages ont été effacés sur mon répondeur téléphonique, et je nai pas reçu le courrier déposé pour moi à la réception. »
Selon son témoignage, son ami aurait été passé à tabac pendant son séjour à Jérusalem parce quil appartenait lui aussi au mouvement.
Ses producteurs, intimidés, ont annulé son contrat qui prévoyait la sortie de deux albums musicaux ; elle a perdu un autre projet artistique quon lui avait commandé et sa carrière de chanteuse est compromise. Pourtant, elle dit « Je me battrai jusquà mon dernier souffle sil le faut. Nous sommes des citoyens, pas des citoyens de seconde classe. Nous méritons le respect et nous devons nous assurer que les droits de lHomme soient respectés. »
Comme des cauchemars
Le témoignage suivant est celui dune femme, mère de sept enfants, qui appartient au mouvement La Famille, un mouvement missionnaire chrétien. La police, se basant sur des informations indiquant que les parents abusaient de leurs enfants, a fait une descente dans les maisons du mouvement :
« À 6 heures du matin, nous avons soudain été réveillés car notre maison était entourée par 50 gendarmes, armés jusquaux dents, avec des gilets pare-balles et des chiens policiers. Ils ont violemment frappé à la porte, et en lespace de quelques secondes, ils avaient envahi toutes les pièces, tenant les occupants sous la menace de leurs armes semi-automatiques. La police sattendait de toute évidence à nous trouver armés et dangereux, bien que nous soyons opposés à la violence sous toutes ses formes. Je voulais courir réconforter ma petite fille de 4 ans qui, assise sur son lit, tendait les bras vers moi en pleurant. On ma violemment repoussée sur mon lit et les policiers se sont mis à hurler contre moi pendant quune femme en uniforme emmenait de force ma petite fille du lit auquel elle saccrochait.
« Les enfants ont tous été emmenés, en pyjama, dans un fourgon de police.
« Pendant 48 heures de garde à vue et dinterrogatoires, on nous a accusés des pires choses. Jai été insultée, dégradée, on ma parlé grossièrement, et cest seulement 8 heures après mon arrestation que jai pu avoir un sandwich et un café. On ne ma pas permis de savoir ce qui était arrivé à mes enfants. Jétais inquiète car mon fils avait eu une très grosse fièvre la nuit précédente.
« Les enfants ont été soumis à plusieurs examens de pédiatres, gynécologues, psychiatres et psychologues. Ces examens humiliants sont restés vivants dans leur mémoire, comme des cauchemars. On leur a dit des choses horribles sur leurs parents : que nous nallions plus les revoir, que nous ne les aimions pas et ne ferions aucun effort pour les avoir à nouveau avec nous. Ils ont été mis dans un centre de détention, et il nous a fallu un mois pour les récupérer. »
En 1999, un non-lieu fut rendu par le tribunal dAix-en-Provence. LADFI, qui était à lorigine des rapports ayant entraîné la perquisition et laffaire pénale, qualifia cependant cet acquittement de désastre et fit appel. En février 2000, lappel fut rejeté et les parents définitivement innocentés.
Discrimination au quotidien
Les cas de harcèlement et dabus ne se limiteraient pas à des mouvements créés récemment. Une Église évangélique de Lyon a subi des restrictions continuelles dans son programme radio. Il y a encore trois ans, les responsables municipaux chargés de lorganisations des manifestations à Lyon avaient aidé lÉglise à organiser ses concerts de gospel bi-annuels dans la ville. A présent, non seulement la ville napporte plus aucune assistance, mais les autorités ont refusé de fournir à lÉglise des facilités telles que lélectricité nécessaire pour le concert.
Malheureusement, le gouvernement français se laisse encore guider par les sirènes de la mouvance anti-religieuse. De leur côté, les autorités en matière de droits de lHomme rappellent avec insistance aux représentants français la notion du pluralisme religieux tel quil est défini par le Comité des droits de lHomme des Nations Unies, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur lintolérance religieuse, la Fédération internationale dHelsinki, lOrganisation pour la Coopération et la Sécurité en Europe, le Directorat des droits de lHomme du Conseil de lEurope et la Cour européenne des droits de lHomme.
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