ÉDITORIAL :
LA RELIGION AU XXe SIÈCLE
a Scientologie est-elle, oui ou non, une religion ? Cette question semble soulever une controverse dautant plus surprenante quelon a affaire, semble-t-il, à un conflit dévidences.
Écartons, tout dabord, les faux arguments qui polluent le débat. Un certain nombre de groupes, à proprement parler antireligieux, ont compris quen Europe les traditions religieuses nétaientpas attaquables directement, mais seulement au travers des mouvements plus jeunes quils appellent des sectes. Ces groupes prétendent respecter les vraies religions et attaquer les fausses, et cherchent à tirer parti dun certain sensationnalisme pour promouvoir des législations qui, une fois adoptées, opprimeraient toute liberté religieuse. La Cour dAppel de Lyon na pas été dupe de ce risque, en rappelant les principes fondamentaux inscrits dans la Déclaration des Droits de lHomme et du Citoyen et dans la Constitution.
Mais il faut bien reconnaître que, même si lon fait abstraction de ces manuvres antireligieuses particulièrement actives et bruyantes à lheure actuelle en France et en Allemagne, un certain nombre de personnes sinterrogent, en toute honnêteté, sur le caractère religieux de la Scientologie.
Dans la plupart des dictionnaires, le mot religion fait référence à la relation à Dieu. Ainsi, les seules religions au monde seraient les trois familles judéo-chrétiennes - judaïsme, christianisme et islam - avec une tolérance linguistique pour les religions polythéistes autrefois qualifiées de païennes. Mais les autres grandes religions de la Terre, hindouisme, bouddhisme, confucianisme, taoïsme, etc. nauraient pas véritablement droit à cette appellation contrôlée.
Il ny a pas si longtemps, dans les textes déminents spécialistes chrétiens, le bouddhisme était clairement présenté comme une philosophie, et non comme une religion. Le Bouddha na jamais prétendu être autre chose quun homme, il a simplement montré aux autres un chemin vers la conscience spirituelle. Pas de Dieu se manifestant au travers dune révélation, pas de prophète, mais une approche de limmortalité en tant quesprit, une recherche dabsolu, une vision spiritualiste de la destinée humaine.
En fait, la civilisation méditerranéenne, puis européenne, a pendant toute son histoire associé le concept de religion au judéo-christianisme, au point de les identifier. Cette limitation du phénomène religieux à des normes spécifiques a finalement vacillé sous lassaut dune prise de conscience plus planétaire. Aujourdhui, les spécialistes des religions incluent dans leur champ les grandes religions dOrient. Et les dictionnaires, depuis quelques années, les définissent bien comme religions, même sils nont pas intégré toute cette évolution dans la définition du mot religion à quelques pages de distance...
La Scientologie, née au XXe siècle au cur de la civilisation scientifique occidentale, sinscrit sans ambiguïté dans la filiation du Bouddhisme. Cest une démarche proposant à chacun de découvrir, en tant quêtre spirituel, ses relations avec la vie, avec les autres êtres, avec lunivers.
A partir du moment où lon sinterroge sur ce qui se passe après la mort, sur la nature de lêtre humain et sa place dans lunivers, on est entré de plain-pied dans le domaine de la religion. Certes, la Scientologie ne serait pas née sans laventure philosophique que nous avons connue depuis les grecs, ni sans les développements de la science moderne, mais il sagit clairement dune religion, en un sens plusieurs fois millénaire.
Un dernier point, qui nest peut-être pas sans intérêt dans les circonstances actuelles. Toute personne qui connaît un peu la Scientologie, comprend immédiatement que la liberté est une valeur essentielle, ce qui entraîne naturellement une attitude de tolérance, autrement dit de reconnaissance du droit inaliénable de chacun à avoir ses propres opinions et croyances.
Ce nest peut être pas totalement original - le bouddhisme déjà procédait de cette échelle de valeurs, les guerres de religions sont absentes de son histoire - mais cela mérite dêtre rappelé.