Une législation d’exception

Depuis 1999 se développe la dernière attaque en date, toujours sous le couvert du péril que ferait courir à la République l’existence de certains groupes, commodes boucs émissaires.

Le Sénat vient en effet de voter une loi d’exception qui remet en cause la loi de 1901 et qu’un petit groupe de pression s’efforce à la hussarde de faire adopter par l’Assemblée nationale avant la fin du mois de mai.

La proposition About-Picard prône la dissolution de groupes dits sectaires dès l’instant où un dirigeant ou un responsable de fait serait condamné pénalement plus d’une fois. Elle veut également punir de peines de prison et d’amendes toute tentative de reconstitution d’un mouvement religieux ou spirituel ainsi dissous.

En d’autres termes, l’État aurait le pouvoir de condamner à la dissolution (qui est pour une association l’équivalent de la peine capitale pour un individu) tout groupe qualifié de sectaire, concept sans définition juridique, sur la base de délits isolés ayant donné lieu à la condamnation d’un ou plusieurs de ses membres.

La loi vise explicitement les 172 groupes religieux, philosophiques et spirituels figurant sur la liste noire de la commission parlementaire de 1996.

Mais les critères retenus sont si flous et laissent une telle place à l’arbitraire qu’elle peut virtuellement s’appliquer à toute association qui aurait le malheur de déplaire aux autorités.

Comme en 1971, comme en 1979, l’avenir démontrera que les prétendus dangers dont on veut protéger le peuple français ne servent en l’occurrence qu’à permettre d’introduire, avec toutes les précautions oratoires d’usage, les grands coups d’archet sur le respect des consciences et les protestations de bonne foi démocratique dont on ne manquera pas de l’abreuver, une législation d’exception.

Remettre en cause la liberté d’association

Or l’esprit associatif n’est pas un vain concept. Pour des millions de Français, il est un lien qui les relie entre eux : association de secours fraternel, de sportifs amateurs, association de consommateurs, de locataires, de soutien à des causes diverses...

Voilà que deux condamnations pénales de dirigeants d’une association, même pour des délits mineurs, en permettraient la dissolution, au détriment de ses membres et même si ceux-ci se dévouent pour une cause très valable.

Le texte prévoit aussi qu’une association juridiquement distincte, mais aux buts similaires, dont les dirigeants auraient été condamnés au moins une fois (par exemple pour excès de vitesse ou pour l’oubli d’un extincteur réglementaire dans les locaux de l’association) pourrait être attirée dans la procédure de dissolution.

La loi ne prévoit pas de garde-fou. Le rapporteur N. About « fait confiance aux magistrats » pour éviter les dérives auxquelles son texte pourrait donner lieu. Mais nous connaissons trop d’exemples de pays où toute opposition, toute défense d’intérêts locaux ou d’intérêts d’usagers, de consommateurs ou même toute promotion d’une culture régionale, seraient taxées de potentiellement nuisible à l’État ou dangereux pour la personne humaine.

L’exercice illégal de la médecine et de la pharmacie dont il est question dans la loi About est déjà largement réprimé par notre code pénal. L’arsenal judiciaire français serait-il donc si pauvre qu’il lui faille remettre en cause la liberté d’association ? À qui fera-t-on croire cela ?

On ne protège pas les citoyens en restreignant les libertés fondamentales.

Continu...




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